

L'arrivée en Chine (Mars 2019)

Le passage de frontière
L’entrée en Chine a été assez folklorique, nous avions halluciné de nos 4 contrôles à la sortie de l’Europe pour entrer en Russie, mais là, c’est un level au-dessus... Bon en même temps, on n’a pas choisi la méthode la plus simple, on aurait pu prendre un train qui passe la frontière et nous emmène à Pékin directement, on aurait eu qu’à suivre le mouvement, mais ce train est très cher. Donc pour économiser plusieurs centaines d’euros, Nadia a trouvé sur un blog qu’on pouvait s’arrêter à Zabaïkalsk en Russie et passer la frontière en bus jusqu’à Manzhouli en Chine, mais ce blog est notre seule source…

A la sortie du train, on ne sait pas trop où aller, on a peu d’infos. Il est 7h30, on a toute la journée pour trouver comment passer la frontière avant l’expiration de notre Visa Russe.
On suit donc le peu d’infos qu’on a, c'est à dire longer le train, traverser les voies et suivre la route. Les groupes de Chinois présents dans le train suivent la même direction, ça nous conforte. On trouve facilement la gare de bus après 15 minutes de marche dans la neige à -12°C, ça pique un peu quand même!!! On achète les billets, et à 8h15, nous sommes assis dans le bus, plutôt fière de notre efficacité! :-)

La première descente du bus et le passage au contrôle de bagage va nous donner le ton pour le voyage en Chine. Les gens se précipitent à la porte, ils courent, se poussent, se doublent, ils finissent presque par se battre. On reste à l’écart derrière, tranquille en les laissant s’entretuer pour faire contrôler leurs bagages et passer le contrôle de sortie de Russie. Une femme avec la liste des passagers du bus ferme la marche et vérifie que tout le monde remonte bien dans le bus à chaque descente. Elle sera particulièrement derrière nous, car nous sommes les seuls étrangers.
L’histoire se complique au premier contrôle Chinois quand un douanier monte dans le bus pour contrôler les passeports et arrive à mon niveau, il bloque sur le mien et le retourne dans tous les sens. Il me parle en Chinois, pas un mot d’anglais, puis part avec mon passeport, à ce moment là, je ne fais pas le malin… Par la fenêtre du bus, on a vue sur la cahute des douaniers: il montre mon passeport à son collègue qui le retourne dans tous les sens à son tour. Je crois qu’ils n’ont jamais vu de passeport français et se demandent d’où on vient. Ils remontent tous les deux dans le bus, puis viennent me parler, toujours en Chinois. Je lui montre la page du Visa Chinois pour qu’ils puissent lire quelque chose, cela n’a pas l’air de le convaincre. Une femme du bus lui dit qu’on est français, tout le monde rigole, on est un peu l’animation du jour je crois… Ils finissent par nous rendre nos passeports et le bus repart.
On descend du bus, récupère nos bagages et on rentre dans un immense bâtiment, genre hall d’aéroport, vide, presque personne.
On arrive à l’immigration, on se met dans une file d’attente, mais on se fait interpeller par un douanier: « Frantsuzskiy » (francais en Russe) et nous fait signe de venir pour nous placer dans une autre file. Il nous attendait, le douanier du bus l'a prévenu, et ça à l’air de vraiment tous les surprendre qu’on soit là!!! Le contrôle d’immigration est bref, en cinq minutes on a notre tampon, on enchaine dix minutes de bus et nous voici aux portes de la ville de Manzhouli...
Manzhouli
Les premières visions de la Chine sont d’immenses centres commerciaux et parc d’attractions au milieu du désert, ça a un air de Las Vegas. La ville est très récente avec des grandes avenues et d’immenses bâtiments neufs partout, on croirait un Disneyland géant.

Le bus nous dépose et on se lance directement à la recherche d’un endroit pour manger. Nous n’avons aucun point de repère, tout est écrit en Chinois, il n’y a pas un mot d’anglais, on est obligé de passer devant chaque vitrine pour voir si c’est un resto ou pas…
On trouve une petite mamie qui fait des soupes, on arrive à se comprendre grâce aux photos des plats, mais au moment de payer, on se rend compte qu'on n’a pas pris le temps d’aller retirer du cash, trop obnubilé par notre faim. On lui montre notre carte bancaire, elle nous montre une machine à carte, mais elle n'accepte que les cartes "Union Pay", elle nous montre un QR code et son téléphone, on ne comprend pas, et elle ne comprend pas notre demande pour trouver un distributeur… Finalement, un livreur nous indique une banque, on est sauvé, on a notre soupe!!!!
A ce moment, on ne savait pas encore qu’on pouvait télécharger les dictionnaires dans l’appli « Google Trad » pour l’utiliser hors connexion, on a donc été sauvé par « G palém’o », un petit livret du routard avec plein de dessins que Nadia m’avait offert vu mes talents pour apprendre une nouvelle langue.
En mangeant notre délicieuse soupe de noodles, on se rend compte qu’ici tout le monde paye avec son téléphone, ils scannent un QR code pour payer, même les petits vendeurs dans la rue utilisent ce système.
L'achat des billets de train pour Pékin
On est restauré, on est réchauffé, on peut aller chercher nos billets de train. Et pour acheter des billets trains, on va à la gare bien sur, donc direction la gare... Là encore c’est sport, tout est indiqué en Chinois, aucune traduction. Après avoir visité les locaux de la Sncf chinoise, on finit par arriver à la gare. Nadia avait noté le numéro du train et l’heure de départ, c’était clair, on avait juste à montrer ça au guichet. Mais c’était sans compter sur la bonne volonté du gars au guichet, qui nous parle en Chinois sans faire aucun effort et en nous regardant à peine.
Pendant ce temps les gens derrière nous poussent, ils arrivent de nulle part et tendent le bras avec leur carte d’identité et des billets pour acheter leur ticket, c’est assez incroyable et super oppressant, personne ne cherche à nous aider, le guichetier nous ignore complètement, mais on insiste en lui montrant ce qu'on avait noté... Heureusement, une jeune chinoise vient nous voir, elle parle un peu Anglais et fait l’intermédiaire avec le guichetier. Après discussion, elle nous note une adresse et nous dit de prendre un taxi pour s’y rendre. « Mais pourquoi? » Le guichetier lui a expliqué que les étrangers ne peuvent pas acheter de billet de train ici, à la gare... Ok, bizarre...mais on n'a pas trop le choix alors on prend un taxi pour nous emmener à cette adresse qui se trouve être... un hôtel!!! On lui remontre l’adresse, il nous confirme que c’est bien là. OK, alors allons voir dans cet hôtel s’ils peuvent nous aider.
L’accueil de l’hôtel nous confirme que c’est la bonne adresse, mais ne comprend pas notre requête pour les billets de train. On va être ensuite baladé dans tout l’hôtel pendant 1h, d’un bowling au sous-sol, jusqu’au 7ème étage à un mariage, on nous passera entre les mains de la moitié du personnel de l'hotel pour finalement revenir dans le hall de l’hôtel bredouille, ou... brecouille comme on dit dans le bouchenois. On n'a pas de billet de train, et on n'est pas plus avancé.
On se pose dans les fauteuils du hall, on se sent impuissant, complètement démuni et on est à court de solution. On capte une wifi dans l’hôtel, mais rien ne fonctionne. Et oui, en Chine il y a un pare-feu géant et on n’a pas de VPN. Je vous avoue qu’à ce moment là on était vraiment désespéré, on ne savait plus quoi faire. On retourne à l’accueil en espérant un miracle... Et le miracle arrive, une femme vient nous parler en Anglais et écoute notre problème. C’est donc encore une femme qui nous sauvera aujourd’hui. Elle nous amènera dans un petit bureau derrière les ascenseurs, elle fera notre traductrice avec son téléphone, car la femme du bureau ne fera aucun effort également. Ça y est , on a nos billets de train pour Pékin, mais on part que le lendemain, maintenant il faut trouver un hôtel!!!
La tache sera plus facile, on regardera sur maps.me l’hôtel le plus proche. Un peu galère à trouver, mais rien comparé à ce qu’on venait de vivre depuis le premier contrôle chinois de nos passeports jusqu’aux billets de train.
On est dans la chambre d’hôtel, posé, au calme, et on redescend de ce marathon. On reste encore perplexe d’avoir dû acheter nos billets de train dans une sorte de conciergerie d’hôtel, mais en tout cas on a payé le prix normal.


Le train Manzhouli - Pékin
Dans la majorité des trains en Chine, il y a 3 classes: « Hardseat », « hardsleep » et « softsleep ». « Hardseat » est la moins chère, mais c’est aussi la moins confortable, ce sont des banquettes durs de 2 personnes d’un côté et 3 de l’autre. « Hardsleep », des couchettes durs (très durs même) sur 3 de hauts dans des compartiments ouverts sur le couloir. Et « Softsleep », des compartiments fermés avec des couchettes plus confortables parait-il. Nous n’avons jamais choisit cette classe.
On est partit à 12h50, l’après-midi se passe plutôt bien, même si c’est pas très confortable, très bruyant et que tout le monde nous fixe du regard, on a l’impression d’être 2 inconnus qui débarquent dans un saloon. La soirée et la nuit seront très compliquées, on ne dormira vraiment pas beaucoup. C’est l’anarchie complète dans le wagon, la lumière n’a pas été éteinte de la nuit. Dire que les gens parlent forts seraient un euphémisme tellement ils hurlent. Notre voisin a passé une partie de la soirée à faire du karaoké avec son téléphone par dessus la musique inaudible diffusée dans le wagon. Des vendeurs à la criée ont défilés pour nous vendre tout et n’importe quoi...

Pour notre premier voyage en Chine de Manzhouli à Pékin, soit 33h... on a voulu faire économe, car en gros le prix double d’une classe à l’autre, on a donc pris « Hardseat ». Quand on a acheté le billet, la femme qui nous faisait la traduction nous a regardé et a insisté sur notre choix, « Vous êtes surs? 33h c’est long en place assise ». Nous on s’est dit ouais t’inquiète, c’est bon on est jeune…ouais ouais… en montant dans le wagon, on a compris pourquoi elle nous a dit ça. Quand ils disent « Hardseat », ils ne plaisantent pas, nous on s’attendait à des sièges de train qu’on connait, inclinable. Mais non, pas du tout, là ce sont des banquettes SUPER dures, les places sont toutes petites, les wagons sont souvent blindés, et l’ambiance est exceptionnelle.
On est tout seul sur notre banquette, on découvre tranquillement comment les gens vivent dans ce pays. Sur la table devant nous, une petite barquette en métal. C’est un crachoir!! Tout le monde connait les lamas du Pérou , mais peu connaissent ceux de Chine. Les gens crachent tout le temps et partout, les hommes, les femmes, les vieux, les jeunes... ils crachent même par terre dans le métro, dans les bâtiments. Donc qu’il y ait des crachoirs dans le train est tout à fait normal ici. Les toilettes (turcs), et les lavabos sont plus que sales. Pas de papier toilettes, pas de savon et les gens fument dans la wagon, autant vous dirent que ça nous change du transsibérien.

Il y a quand même eu une légère accalmie pour les dernières heures, mais à 5h20, le réveil est brutal. On s’arrête dans une gare et le wagon se remplit en 2 minutes dans un brouhaha hallucinant. On n’était seul sur notre banquette et on se retrouve compressé. Les gens débarquent tous avec de la bouffe, et je vous avoue que l’odeur des nouilles lyophilisées au réveil c’est hardcore. Le wagon qui avait été nettoyé pendant la nuit ne tiendra pas 1h, la moitié de leurs déchets finit par terre et ils ne ramassent rien. Le sol est jonché de déchets en tout genre; paquet de gâteau, poches plastiques, épluchures de fruits...
La musique du wagon se rallume et tout le monde y ajoute la sienne, musique et films à fond sur les téléphones, comme s’ils n’avaient pas de voisin. Ça se racle la gorge dans tous les coins pour cracher, et il y a, en plus, tout un groupe qui enchaine les bières. Les gars deviennent très vite complètement bourrés, vous imaginez bien que ça ne les rend pas plus discret. Le summum arrivera avec le gars en face de nous qui se coupe les ongles en les laissant par terre…
Le décor dehors est à l’image du wagon, des déchets partout le long des voies. Dans les champs, des tas de déchets à moitié brûlés, à moitié enfouies, c’est un désastre.
Ces premières images de la chine et des ses habitants nous inquiètent un peu pour le reste du voyage…
Ecrit par Kévin le 14 Mai 2019